Exposition
Sculpteurs d’avant-garde… au 16e siècle
Découvrez le maniérisme dans l'Entre-Sambre-et-Meuse, un patrimoine boudé par le monde académique, remis en lumière. Personnages aux proportions exagérées, étirés, aux hanches anguleuses, au long cou sinueux et aux doigts fuselés vous étonneront sans nul doute !
Sculpteurs d’avant-garde… au 16e siècle. Le Maniérisme dans l’Entre-Sambre-et-Meuse est le reflet partiel du travail de fourmi réalisé par un groupe de chercheurs et restauratrices, réunis autour de Michel Lefftz, professeur à l’Université de Namur et spécialiste de la sculpture médiévale et moderne.
L’intérêt porté par Michel Lefftz, commissaire de l’exposition, aux stalles du Chœur des Dames, conservées dans la collégiale Sainte-Gertrude de Nivelles, constitue le point de départ des recherches. L’ensemble des sculptures en bois ornant les stalles a permis de mettre en évidence la production d’un atelier de grande envergure réuni autour d’un Maître, actif dans le troisième quart du 16e siècle en région mosane, et se situant dans le sillage d’un artiste tel que Lambert Lombard. Les stalles s’inscrivent, par la forme et par le style des figures qui les ornent, dans la veine maniériste : des personnages aux proportions exagérées, étirés, aux hanches anguleuses, au long cou sinueux et aux doigts fuselés, dont les visages sont marqués par une dissymétrie des yeux. Diverses mains ont contribué à leur réalisation, un maître, pour les parties les plus abouties, et plusieurs collaborateurs, d’où la variété des groupes sculptés et les divergences de qualité. À partir des stalles de Nivelles et de leur Maitre « principal » donc, deux autres sculpteurs et ateliers ont été « identifiés » – le Maitre de Gedinne et le maitre des saints Roch – et un premier corpus d’œuvres, dont la majeure partie est encore en place dans les édifices de culte, a pu leur être attribué.
Présenter les recherches en cours de développement sur le Maniérisme, ce courant stylistique mal connu du grand public, dans les dernières décennies du 16e siècle, peu considérées dans l’Histoire, dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, délaissée par la recherche, à travers un matériau considéré moins noble que la peinture, à savoir la sculpture sur bois, est l’enjeu majeur de cette exposition.
« La période qui commence avec le règne de Corneille de Berghes ([1538-1544], successeur d’Erard de la Marck, est une période de décadence pour les arts », écrivait Jules Helbig, dans sa synthèse, La sculpture et les arts plastiques au pays de Liège et sur les bords de la Meuse, parue en 1890. Eugène Muntz, de son côté, dans Raphaël et son temps, évoquait la « longue et douloureuse agonie » de l’art des dernières décennies du 16e siècle. Quelques dizaines d’années plus tard, Simon Brigode, concluait son étude La sculpture au XVIe siècle, sur la « variété de tendances » développées par les artistes du 16e siècle, dans la masse desquels n’émerge(nt) qu’ « un ou deux artistes au tempérament exceptionnel ».
Tirant son origine de l’appellation maniera moderna faite par Giorgio Vasari dans ses Vitae pour désigner la production artistique à partir de l’avènement de Michel-Ange, le Maniérisme est un courant qui demeure encore à ce jour boudé, tant par le monde académique – ces quelques extraits sont éloquents – que par le grand public.
Si son langage sophistiqué et ses poses complexes peuvent séduire, il n’en demeure pas moins que le champ de recherche s’est jusqu’ici souvent cantonné à la peinture, principalement italienne, de cette période.
En ce qui concerne la production au nord des Alpes, plus particulièrement dans nos contrées, quelques centres ont toutefois été étudiés et plusieurs noms retenus : Cornelis Floris à Anvers, Lambert Lombard à Liège ou, encore, Jacques Du Brœucq, le maître de Giambologna, qui travailla principalement à Mons.
Le sud du pays se révélait être le grand oublié de cette période puisqu’aucune production d’influence maniériste n’avait été mise jusqu’à présent en exergue par la recherche pour le sillon d’Entre-Sambre-et-Meuse. Or, beaucoup de sculptures, encore en place dans de nombreuses églises de Wallonie, témoignent, au contraire, que ce silence historiographique ne serait dû, en réalité, qu’à un oubli dans l’Histoire d’une production prolifique qui semble avoir embrassé ce courant. Ce manque d’intérêt s’explique sans doute aussi par le fait qu’aucun nom ne soit arrivé jusqu’à nous pour cette zone géographique et que, jusqu’il y a peu, la méthodologie en histoire de l’art tendait à essayer de rattacher des œuvres à un nom d’artiste connu, dont la carrière était documentée par les sources.
Montrer la richesse de la production dans les principaux centres locaux de l’Entre-Sambre-et-Meuse, à cette époque, et mettre à l’honneur les églises, comme lieux de conservation du patrimoine, aux côtés des musées, de même que leurs fabriciens, qui jour après jour, veillent à la pérennité de ce patrimoine sont quelques-unes des ambitions de cette exposition.
Liste des prêteurs
- Amay, église Saints-Georges-et-Ode
- Bouvignes, église Saint-Lambert
- Bruxelles, Musées royaux d’Art et d’Histoire
- Carlsbourg, église Sainte-Gertrude
- Champlon-Waha, église Saint-Pierre
- Collections privées
- Commune de Thuin et église de Christ-Roi de Thuin-Waibes
- Commune d’Onhaye
- Dinant, église Saint-Paul des Rivages
- Floreffe, église abbatiale
- Fosses-la-Ville, collégiale Saint-Feuillen
- Foy-Notre-Dame, sanctuaire Notre-Dame
- Gedinne, église Notre-Dame
- Hastière-par-Delà, église abbatiale Saint-Pierre
- Hermeton-sur-Meuse, église Saint-Remi
- Liège, Grand Curtius
- Liège, Musée Wittert
- Maastricht, Bonnefanten Museum
- Marche-en-Famenne, église Saint-Remacle
- Namur, Musée diocésain
- Seilles, église Saint-Étienne
- Ways, église Saint-Martin